YVES-ARMAND MILLECAM texte de Fernand Gabriel ANDRIEU

Publié le 2 Décembre 2009


    Ce site présente le travail d’Yves Millecam durant ces dernières années où alternent portraits, paysages, et surtout natures mortes, genre qu’il semble privilégier par tempérament. Pour qui connaît sa peinture depuis longtemps, le sentiment d’une continuité dans son art apparaît. Certes tout peintre subit une évolution, ne serait ce que par les changements que la vie impose.


    Mais ce qui compte, c’est le sentiment que l’œuvre se forme dans le temps, avec ces choix, ces contradictions aussi. Ce mélange de pudeur qui habite l’artiste et en même temps son désir de « montrer » les choses, celles qu’il peint, celles auxquelles il est attaché, mais qui restent extérieures à lui, parce qu’au fond , elles ne sont là que pour servir l’inspiration. En cela Yves Millecam reste fidèle à presque tous les grands maîtres chez lesquels ont sent immédiatement que, si le sujet n’est pas sans importance, il n’en reste pas moins secondaire par rapport à l’essentiel qui est l’art de peindre. ?
       PORTRAITS  
 
   
J’évoquais la pudeur de l’homme. Cela se manifeste dans les portraits qu’il a peints. S’il cherche avec toute la technique dont il est capable à approcher au plus prés de son modèle, il se garde bien de chercher à rendre sa personnalité, et encore moins ses sentiments, comme si une approche trop expressionniste risquait de dévoiler quelques secrets qu’il est bon que l’on ne sache pas. Cette discrétion, cette retenue envers le modèle donne justement à ces portraits une vérité que d’autres cherchent sans jamais la trouver. Le réalisme ici ne court pas après une réalité impossible, il ne fixe pas plus un moment, car on sait que le temps passé à peindre rendrait cet exercice vain. Mais tout réside dans une représentation où le modèle, sans dire ce qu’il est ou ce qu’il ressent, s’est présenté aux yeux de l’artiste. C’est l’acte de peindre, et de peindre cette personne là qui compte le plus à cet instant. Cela est d’autant plus vrai que dans des œuvres récentes, il réalise des portraits de personnages anonymes, des femmes marocaines dans des compositions qui rappellent les scènes de genres d’autrefois. Cette approche nouvelle montre que ses préoccupations picturales restent les mêmes tout en trouvant des sources d’inspirations nouvelles.

Yves Millecam peint relativement peu les paysages. Non pas que la nature ne l’intéresse pas. Mais la lumière toujours changeante, la précarité de l’esquisse à prendre sur le motif, représente des contraintes dont on sent bien qu’elles lui semblent parfois difficiles à assumer. Ce sont d’ailleurs des paysages du Maroc, pays où il voyage souvent et où il retrouve la lumière, les couleurs, les bâtiments même qui sont assez proche de ceux de son enfance en Afrique du Nord, et dont il a gardé la douce nostalgie. Il se dégage de ces paysages un sentiment d’éternité, par la fixité du regard, l’absence de personnages qui viendraient perturber la tranquillité d’une rue déserte, le jeu de l’ombre sur un pan de mur, l’harmonie d’une arcade.
D’une période ancienne où il pratiquait avec le même talent une abstraction géométrique, il a gardé le souci de la rigueur des lignes, de la construction de l’espace dans la cadre de la toile.
                 INTERIEURS
On sent le même soin à rendre une réalité, la sienne celle qu’il compose comme un musicien à partir des éléments que lui offre la nature mais soumis à son propre choix. En cela aussi il se rattache aux plus grands artistes qui loin de se soumettre à la tentation d’une représentation impossible de la nature, choisissent de façonner le paysage pour se l’approprier et en faire un signe de leur création.
 

    Mais le domaine d’élections d’Yves Millecam reste ce que l’on nomme la nature morte, expression qu’il n’aime guère, préférant parler de portraits d’objets. Peintre d’atelier, comme ses grands prédécesseurs, il se sent à l’aise face à une composition dont il a soigneusement choisi chaque objet, chaque détail. Objets de son décor familier, pots de différentes matières, fruits posés sur une table ou encore dans une coupe marocaine, carafe d’eau de son ami Mathias dont il parvient à rendre la transparence, sans que cela soit un effet facile, fleurs enfin, lys, orchidées, simples marguerites parfois, là encore dans des vases de cristal ou de faïence chinoise.

On retrouve son goût de l’équilibre dans chaque composition, la rigueur de la mise en place, les effets de lumière qui traversent la toile et lui donne sa géométrie. Il parvient à rendre vie à ces objets inanimés dans une vibration de couleurs qui peuvent être selon son humeur assourdies ou au contraire très vives. Des citrons jaunes ont l’air d’exhaler leur parfum et c’est tout le soleil de l’Afrique du nord qui semble sortir de la toile. On verra dans le catalogue une de ses plus belles œuvres, une de celles dont il n’a pu se séparer jusqu’ici ; une grande composition sur un fond de tissu plié, une corbeille d’osier, une table chinoise et tout cela dans un camaïeu de gris, à la fois si simple et si accomplie.
 JARDINS

     Le regard reste suspendu à cette toile, comme un temps arrêté, un instant d’éternité. Tout l’art d’Yves Millecam est là.

Rédigé par MILLECAM

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